Certaines propriétés thermiques des matériaux possèdent une grande influence sur le confort d’été, et doivent donc être considérées dans la conception bioclimatique de votre construction, notamment dans les régions les plus chaudes. Mais pour faire les bons choix, il faut comprendre comment cela fonctionne, et faire la différence entre deux notions proches, le déphasage et l’inertie.
Le déphasage
Le déphasage est parfaitement représenté par la courbe ci-contre. Il s’agit du décalage entre la courbe de température extérieure (en jaune) et la courbe de température intérieure de votre habitation (en rouge pointillée). Par exemple, sous le soleil de midi, il fait très chaud dehors, tandis que vous êtes encore au frais dans votre maison. Le front de chaleur arrivera à l’intérieur mais avec un décalage temporel. C’est le déphasage. Pourquoi ? La clé est dans une propriété thermique appelée diffusivité thermique. Pour simplifier, c’est la rapidité que met la chaleur à traverser vos murs. Celle-ci dépend à la fois de la capacité isolante du mur, de sa densité et de sa capacité de stockage de l’énergie. Si le matériau est un bon isolant, il ralentit la conduction de la chaleur. De même, plus la densité du matériau est élevée, plus la diffusivité est faible et plus le déphasage est grand. Pour atteindre un fort déphasage, la solution optimale est donc un matériau à la fois lourd, isolant et bon accumulateur de chaleur. La fibre de bois sera un meilleur déphaseur que la laine de verre car elle est plus lourde et accumule plus de chaleur pour une même isolation.
Lorsque, pendant la journée, la température monte progressivement, un mauvais déphaseur transmet la chaleur à l’intérieur peu de temps après et la maison surchauffe vite, alors qu’un bon déphaseur retarde la diffusion de la chaleur jusqu’à la nuit, plus fraîche. Il est alors possible de ventiler abondamment votre intérieur pour compenser l’apport solaire déphasé. Sept à dix heures, cela correspond généralement au temps de déphasage optimal.
L’utilisation du déphasage possède cependant ses limites dans la recherche du confort d’été. En effet, le déphasage n’a d’impact que sur les apports d’énergie à travers les parois. Les apports d’énergie à travers les fenêtres ou bien les apports internes (liés à l’activité humaine et aux appareils électriques notamment) ne sont pas traités par le déphasage. Or, ils représentent une part très importante des risques de surchauffe en été. Si aucune mesure n’est prise pour limiter les apports solaires (stores, vitrages solaires,…) le déphasage n’aura quasiment aucun impact sur le confort d’été.
Utiliser le déphasage n’a également de sens que si l’on peut refroidir la maison durant la nuit au moment ou le front de chaleur pénètre à l’intérieur. Pendant les périodes de canicule, la nuit n’est plus si fraîche et le déphasage n’est plus intéressant.
L’inertie thermique
L’inertie est une notion différente du déphasage, qui se caractérise par une atténuation des variations de température.
L’effusivité thermique, c’est-à-dire la capacité du matériau à absorber la chaleur sans se réchauffer, est la propriété thermique correspondant à l’inertie. La plupart du temps, les matériaux à forte inertie sont aussi de bons déphaseurs : c’est la densité du matériau qui est déterminante dans les deux cas. Par contre, les isolants peuvent avoir un fort déphasage mais ne peuvent en aucun cas avoir une bonne inertie : leur faible conductivité gêne la diffusion de la chaleur dans la totalité de la masse et donc empêche un bon stockage de l’énergie. Le béton, le parpaing ou la brique sont par contre des matériaux à très bonne inertie.
Tant que la température de l’air ambiant est élevée, les parois à forte inertie stockent de l’énergie sans augmentation conséquente de température. Elles jouent en quelque sorte le rôle de « réservoir d’énergie ». Evidemment, un réservoir n’a jamais une capacité sans fin donc il faut le décharger régulièrement. Comme pour le déphasage, il est indispensable de ventiler abondamment votre intérieur pendant la nuit pour vider vos parois de l’énergie emmagasinée durant la journée.
L’inertie est bien plus intéressante que le déphasage pour le confort d’été car elle traite tous les apports d’énergie (apports solaires par les parois, par les fenêtres ou les apports internes). La seule condition pour être véritablement efficace est que le matériau à forte inertie soit du côté de la pièce pour pouvoir absorber tous les apports. Si vous optez pour des murs extérieurs à forte inertie, une isolation par l’extérieur est donc nécessaire.
Si vous souhaitez isoler par l’intérieur, il est possible d’apporter de l’inertie avec les murs intérieurs (refends), les planchers ou les plafonds de la maison. Plus vous aurez de parois à forte inertie, plus votre réservoir d’énergie sera grand et plus votre température intérieure sera stable tout au long de la journée.
La conception bioclimatique d’une maison est une ingénierie complexe, et faire les bons choix demande des calculs précis. C’est pourquoi il est plus simple de faire appel à un bureau d’études thermiques neutre et indépendant qui sera capable de prendre en compte votre budget et vos préférences dans l’accompagnement de votre projet de construction.
vous devriez revoir votre commentaire. Autant je suis d’accord avec vous sur le fait que si l’on crée des apports solaires l’été, on diminue la qualité de déphasage , autant il est faux de dire que cela ne sert à rien en temps de canicule. La plupart des maisons visitées par temps de canicule, (au dessus de 20° la nuit pour au moins 35° au zénith) étaient autour de 34° la nuit. Une maison à déphasage, en pierre ou monomur ou béton de chanvre, ne montait pas au dessus de 28 à 29° en temps de canicule. La différence est appréciable. Ce sont des centaines de projets personnels et d’expériences en architecture qui me permettent de vous certifier que le déphasage est le principal outil de la lutte contre les canicules.